Cela faisait longtemps que je voulais lire ce
classique sur la Bourse, mais il est extrêmement difficile à se procurer.
J’ai finalement réussi à l’acheter par l'intermédiaire d'un revendeur sur
Amazon.com. Celui-ci se trouvant en Angleterre, le livre est arrivé dans ma
boîte aux lettres quelques semaines plus tard. Cela valait la peine
d'attendre!
Ce qui augmente l’intérêt du livre est que,
contrairement à Jesse Livermore, Darvas n'était pas un investisseur
professionnel. Il était un danseur professionnel. Avec sa partenaire de
danse, Julia, ils se produisaient dans les boîtes de nuit à travers le monde.
Et comme il n'était pas un investisseur professionnel, il a appris à la dure.
Il a appris par la pratique. Dans son livre il raconte son cheminement, les
erreurs qu'il a commises en cours de route, ses fautes de jugement et comment
il a finalement mis au point sa propre théorie, qui lui a valu 2 millions de
dollars en 18 mois, à partir d’un investissement de 25000 $.
Darvas fut introduit au marché boursier tout à fait
par hasard. En 1952, on lui proposa de donner un spectacle de danse à
Toronto. Les deux frères auxquels appartenait le club, Al et Harry Smith, lui
firent une offre inhabituelle. Ils le rémunéreraient en actions d'une petite
compagnie minière canadienne appelée Brilund. Ces actions valaient 50 cents
chacune - 6000 pour une valeur 3000 $. Darvas était un peu sceptique, il
savait que les prix des actions pouvaient fluctuer. Les Smiths acceptèrent de
combler la différence en espèces si la valeur de l’action chutait en-dessous
de 50 cents durant les six mois suivant l'opération. Darvas accepta.
En fait, Darvas ne put respecter son engagement.
Comme compensation, il proposa aux deux frères d'acheter les 6000 actions
pour 3000 $. Il obtint les actions. Puis les oublia. Deux mois plus tard, il
s’aperçut qu’elles avaient monté à 1,90 $. Il les vendit et fit un bénéfice
de 8000 $. Son intérêt fut éveillé.
Ensuite commença son apprentissage. Il pensa que les
actions à moins de 1 $ des mines canadiennes feraient fureur." J’entrais et
sortais du marché comme une sauterelle", écrit-il. Il devint tellement
attaché à certaines actions, qu’il les qualifiait de ses «pets» (« animaux de
compagnie »). Il perdit de l'argent. Il quitta le marché canadien et ouvrit
un compte avec un courtier à Wall Street.
Son éducation se poursuivit. Il suivit des conseils
de courtiers. Il souscrivit à des bulletins d'information. Il lut des livres.
Il essaya l'analyse fondamentale. Et il sur-négocia dans tous les sens. Quand
Rayonier passa de 50 $ to 100 $, il acheta et revendit 3 fois, gagnant 5 $
par ci, 8 par là et 2 $ pour sa dernière transaction. Il gagna 13 $ par
action Rayonier au lieu de 50 $.
Quand il découvrit la répartition des actions en
industries, il pensa qu’acheter l’action la plus forte de l’industrie la plus
forte était une bonne stratégie. Il était tellement convaincu de son idée
qu’il alla jusqu’à hypothéquer une propriété qu’il possédait à Las Vegas.
Puis il emprunta sur une police d'assurance et investit 50000 $ dans la
société sidérurgique Jones & McLaughlin sur marge. Trois jours plus tard « la
foudre frappa. Jones & McLaughlin commença à baisser. » Darvas fut stupéfait.
Il voulut croire à une perte temporaire. Puis il prit peur. « Je tremblais
quand je téléphonais à mon courtier », écrit-il. "J’étais terrifié quand
j’ouvrais le journal. Je vivais littéralement avec mon action. Je la
regardais comme un père soucieux veille sur son enfant nouveau-né. "
Comme vous le constatez, Darvas a un talent
d’écriture incontestable. Il sait comment attirer l'attention du lecteur.
Nous sommes tous passés par là. Nous savons de quoi il parle!
Mais Darvas n'a pas abandonné. Il a continué à
développer sa propre méthode d'investissement, une approche essentiellement
technique. Il l'appelle la « théorie de la boîte » et elle fonctionne comme
suit : il avait remarqué que les actions fluctuent et que les actions à la
hausse ont souvent tendance à prendre une pause et fluctuer à l’intérieur
d’une fourchette, qu’il nomma « boîte ». Il s’était également aperçu que
lorsque l’action sort de cette boîte à la hausse, elle a tendance à continuer
à monter. Et si elle en sort à la baisse, la tendance s’inverse.
Par exemple, si une action fluctuant entre 45 et 50 $
– une boîte 45/50 – monte à 51 $, elle montera probablement encore plus. Si
l’action descend à 44 $, elle continuera probablement à descendre. Donc il
achètera à 51 $ et fixera la limite de sa perte au plafond de la dernière
boîte, soit 50 $. Pour ses premiers achats, Darvas utilisait des ordres «
stop » très serrés. Il estimait qu’une action sortie de la boîte ne
retournerait pas dans la boîte. Si cela arrivait, alors il aurait commis une
erreur et voudrait en sortir le plus rapidement possible, avec le moins de
dommages possible. Il voyait aussi l’augmentation du volume comme un
indicateur positif.
Darvas ne répugnait pas à miser sur le même stock
plusieurs fois. Par exemple, sur la compagnie sidérurgique Cooper-Bessemer,
il a misé à trois reprises de novembre 1956 à avril 1957. Il a acheté à 46,
arrêté au 45 1 / 8; acheté à 55 3 / 8, arrêté à 54; acheté à 57 et vendu avec
un gros profit à 70 ¾. Deux défaites et une victoire pour un gain global de
plus de 1500 $. À l'automne 1957, un marché baissier survint, mais ses ordres
« stop » l’avaient sorti de toutes ses positions bien avant. Son système lui
avait permis de gagner de l’argent, alors que le marché avait chuté.
Darvas était fasciné par le fait qu'il n'avait pas
besoin de théories ou de prévisions quant à la direction générale du marché.
Il lui suffisait d’observer le comportement de chaque action. Et il a appris
qu’on ne peut pas avoir des émotions en ce qui concerne le marché boursier.
"Je prenais les choses telles qu’elles étaient, pas comme je voulais qu’elles
le soient. Je restais simplement à l'écart, en attendant des meilleurs jours.
"
C'est au cours de cette période de correction qu'il
fit une importante découverte. Il lisait les rapports boursiers tous les
jours. Il remarqua que certaines actions perdaient du terrain à contrecœur,
résistant à la tendance baissière. En vérifiant ces actions plus en
profondeur, il découvrit qu'elles faisaient croître leurs profits. « Les
fonds allaient dans ces compagnies même dans un mauvais marché. Ces fonds
semblaient traquer les entreprises qui amélioraient leurs profits. »
Il ajouta cette notion fondamentale à sa théorie de
la boîte technique. "Je sélectionnais les actions selon leur comportement
technique sur le marché, mais je les achetais uniquement quand la raison
principale de l’achat était l’accroissement des profits.
Il décida ensuite de se concentrer sur « les actions
des sociétés d’avant-garde et dont je pouvais espérer que de futurs produits
révolutionnaires seraient susceptibles d’améliorer considérablement les
profits de l’entreprise. » Oui, il était devenu un investisseur dans les
technos … dans les années 1950. « C’étaient des industries naissantes, en
pleine expansion et à moins d’un imprévu, leur expansion allait bientôt être
prise en compte par le marché. »
Vous avez peut-être remarqué des ressemblances
frappantes avec l'approche de Jesse Livermore. D'autres ont eu l'idée de
tester le marché en achetant graduellement : un peu aujourd'hui, un peu plus
après une confirmation et encore plus après. En fait, à l'instar de
Livermore, Darvas était un joueur. Il achetait peu d’actions. Après qu'il
gagnait un million, il le réinvestissait en deux titres uniquement!
Le livre de Darvas est un récit fascinant. Il est
intéressant autant pour la description des erreurs qu’il a commises que pour
celle de ses succès. Et il se lit comme une histoire d’aventures, qui vous
captivera du début à la fin. Procurez-le-vous! Vous ne serez pas déçus.
Marco den Ouden
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