* Chronique André Gosselin parue dans le
Bulletin Disnat.
L'analyse technique n'a jamais eu très bonne
presse auprès des économistes, et encore moins parmi les professeurs
de finance de nos universités. Le livre qui, depuis un quart de
siècle, a fait le plus mal à l'analyse technique est sans contredit
celui du professeur de l'Université Princeton, Burton Malkiel,
intitulé A Randon Walk Down Wall Street .
Depuis plus de 25 ans, ce best-seller de la
littérature financière (on en est à la 8 e édition) défend avec
acharnement l'idée qu'il est impossible de battre le marché à long
terme, que ce soit avec l'aide de l'analyse fondamentale ou de
l'analyse technique.
Si l'approche fondamentale est essentielle
pour bien évaluer les titres boursiers, dit Malkiel, il n'en est pas
de même avec l'analyse technique. Non seulement cette approche ne
permet pas à l'investisseur de dégager des bénéfices intéressants,
mais en plus elle n'a aucune utilité pour le bon fonctionnement des
marchés financiers. Bref, elle est une nuisance à tous les niveaux.
La séquence des prix sur un indice ou sur un
titre quelconque, dit-il, ne fournit pas suffisamment d'informations
pour battre le marché. Ces prix sont sous l'influence de facteurs si
nombreux et variés qu'il est impossible de prétendre qu'en soi ils
contiennent leur propre logique.
En 1999, paraissait un livre écrit par deux
professeurs du MIT, Andrew Lo et Craig MacKinlay, qui prend le
contre-pied de celui de Malkiel. Son titre: A Non-Random Walk Down
Wall Street . Les deux chercheurs du MIT dressent un portrait
beaucoup plus positif et scientifique de l'analyse technique.
Leur constat est clair : il est possible de
générer des rendements supérieurs à la moyenne du marché quand on
utilise adéquatement l'analyse technique, comme les analyses de
tendances des cours et les figures chartistes (formation tête et
épaules, triangles, etc.).
Avant les études de Lo et MacKinley, l'étude
scientifique de l'analyse technique posait de graves problèmes.
Comment vérifier une technique d'investissement qui relève surtout de
l'art, du jugement personnel et de l'interprétation de graphiques
boursiers par l'analyste ? Le défi des chercheurs consistait à
trouver une méthodologie capable de détecter, à l'aide de lecteurs
optiques et de logiciels informatiques, les patterns et figures
géométriques pour ensuite les mathématiser.
Eh bien c'est chose faite. On peut tester
aujourd'hui la valeur de l'analyse technique avec les mêmes
instruments qui servent à la reconnaissance des empreintes digitales
ou des portraits robots. L'analyse technique peut enfin être examinée
sur de longues périodes, peu importe la quantité de titres et de
graphiques.
Grâce à Lo et MacKinley, on sait désormais
que plusieurs outils et règles de l'analyse technique permettent aux
investisseurs de réaliser ce qu'on appelle, en langage d'économiste
financier, des rendements excédentaires, supérieurs à la normale.
Est-ce à dire que les analystes techniques
obtiennent de meilleurs résultats que les autres types
d'investisseurs ? Je ne le crois pas. Il faut beaucoup de discipline
et de rigueur pour obtenir tous les fruits de l'analyse technique. Et
c'est ce qui fait cruellement défaut à la majorité de ceux qui sont
tentés par cette approche d'investissement.
André Gosselin
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