* Chronique extraite du volume « Investir à l’aide de l’analyse technique » de l’auteur André Gosselin.
Avant l'arrivée de l'informatique et des
bases de données électroniques sur les activités boursières, la
seule façon de dénicher rapidement des titres ayant connu de bons
rendements par rapport au marché était d'utiliser des graphiques
d'analyse technique. Le développement d'Internet permet maintenant
d'utiliser sans frais des moteurs de recherche qui trient et classent
tous les titres d'un marché en fonction des critères de votre choix.
Parmi ces critères, il y a, bien sûr, le momentum de chaque titre ou,
si vous préférez, son rendement dans les 3, 6 ou 12 derniers mois
(les périodes dépendent des options que vous offrent les trieurs de
titres).
Par exemple, des trieurs de titres comme
celui de Yahoo Finance ou celui de Globeinvestor permettent d'obtenir
instantanément, sans recours à des graphiques, une sélection des 10
ou 20 titres qui ont connu la plus forte croissance de leurs cours
dans les 6 ou 12 derniers mois. À cette information très prisée par
les analystes techniques vous pouvez dorénavant combiner n'importe
quel facteur propre à l'analyse fondamentale. Ainsi, vous pourriez
demander qu'on vous sorte les 10 titres qui ont connu le meilleur
rendement de leurs prix en Bourse dans les 12 derniers mois, mais
seulement à l'intérieur de la catégorie des titres qui ont un
multiple cours/bénéfices inférieur à 12.
L’investisseur qui mise sur ce type de
portefeuille sera considéré par les uns comme un analyste technique
et par les autres comme un fondamentaliste. Pourtant, il n'est ni
l'un ni l'autre ou, si vous préférez, il est les deux à la fois, car
il recherche des titres qui ont n très bon momentum de leurs cours
boursiers, mais qui, en même temps, constituent de bonnes aubaines
dans le marché. Ainsi, les trieurs de titres dans Internet permettent
d'avoir le meilleur des deux mondes, c'est-à-dire de combiner des
critères d'analyse technique avec des critères d'analyse
fondamentale. Mieux encore, ces nouveaux moteurs de recherche vous
permettent d'être un investisseur systématique, car tous les titres
d'une ou de plusieurs places boursières seront filtrés par votre
grille afin de répertorier les seuls candidats qui répondent aux
critères d'admission.
Les investisseurs nord-américains n'ont pas
encore pris conscience de la portée révolutionnaire de ces outils de
recherche dans Internet. Ils commencent peu à peu à utiliser ces
instruments, mais sans savoir exactement toute la rigueur et toute la
profondeur qu'ils peuvent donner à leur stratégie d'investissement.
D'ailleurs, je ne vois pas de meilleure façon d'investir que de
marier l'analyse technique à l'analyse fondamentale pour ainsi aller
chercher l'essence des deux approches et en tirer le maximum. Les
analystes techniques les plus sérieux et les plus disciplinés
étudient une centaine de graphiques par jour. Même s'ils pensent
qu'ils ont un échantillon suffisant pour appliquer leur stratégie
d'investissement, ce n'est pas le cas. Les trieurs de titres dans
Internet filtrent en quelques secondes plus de 5 000 titres. Il n'y a
pas de comparaison possible, en l'occurrence si votre stratégie
comporte 5 ou 10 critères de sélection. Dans un tel cas, on n'aurait
pas assez de 100 analystes techniques pour arriver à un résultat
comparable.
Depuis le début du marché haussier des années
1990, l'approche momentum s'est taillée une bonne place parmi les
approches classiques axées soit sur la valeur des titres, soit sur
la croissance des entreprises. Comme le dit son nom, l'approche
momentum parie sur les titres qui ont le vent dans les voiles. Cela
signifie, pour les uns, qu'il faille acheter les titres qui ont connu
la plus forte appréciation de leurs cours boursiers au cours des
derniers mois. Pour les autres, il s'agit d'acheter les titres des
entreprises qui ont connu la plus forte croissance des bénéfices au
cours des trois, quatre ou cinq dernières années. On peut croire,
d'emblée, qu'il y a deux grandes écoles à l'intérieur de l'approche
dite de momentum. Mais j'ai plutôt tendance à penser que ce sont
deux approches distinctes qui se sont approprié la même étiquette.
D'où une certaine confusion des genres. D'ailleurs, l'approche dite
de momentum des bénéfices peut être vue comme une variante de l'école
des chasseurs de croissance, sans plus.
Le point commun de ces deux stratégies est
que les titres qui connaissent une forte appréciation de leurs cours
sont souvent ceux des compagnies qui enregistrent une croissance
spectaculaire de leurs profits. Toutefois, les investisseurs qui
capitalisent sur le momentum des bénéfices ne recherchent pas
explicitement les titres qui ont le plus enrichi leurs actionnaires
depuis un an. Ils préfèrent porter leur regard sur les compagnies qui
déclarent des bénéfices supérieurs aux attentes des analystes ou pour
lesquelles les analystes révisent à la hausse leurs prévisions des
profits.
L’approche qui mise sur le momentum des prix
des actions est à mon sens la plus singulière des deux, car elle a
une particularité assez originale et un objectif très précis:
retrouver dans le marché les titres qui suscitent depuis peu un
engouement général de la part des investisseurs. Des titres qui
peuvent facilement avoir réalisé un rendement de 100%, de 200% et
même de 300% au cours des 12 derniers mois. Bien sûr, il ne s'agit
pas d'espérer autant pour les mois à venir, mais simplement de
profiter de la vague et de savoir se retirer à temps avant qu'elle ne
casse.
Avant l'avènement d'Internet et des bases de
données boursières sur support informatique, l'approche momentum
n'était réservée qu'aux seuls adeptes de l'analyse technique.
Aujourd'hui, n'importe quel investisseur peut adopter une approche de
momentum, sans rien connaître de l'analyse technique. il lui suffit
d'avoir un ordinateur personnel et d'être branché sur le Web.
Malgré les innovations technologiques
majeures qu'apporte Internet, plusieurs barrières psychologiques
freinent l'élan de l'investisseur individuel vers les valeurs qui
ont connu une très forte ascension au cours des derniers mois.
L’attitude de l'investisseur moyen devant des valeurs en plein
momentum est de croire qu'il s'agit de titres hautement spéculatifs
ou de penser que ces valeurs ont réalisé leur plein potentiel de gain
en capital et qu'il n'y a plus de marge disponible pour du rendement
supplémentaire. La résistance est forte et la stratégie n'est pas
appelée à souffrir si tôt d'un excès de popularité.
Pourtant, la recherche universitaire des 10
dernières années est unanime à reconnaître que les titres qui ont
connu la plus forte appréciation de leurs cours boursiers dans les 6
à 12 derniers mois ont tendance à battre le marché les 6 à 12 mois
suivants. Cette observation est valable tant pour les pays de la
communauté européenne que pour le Canada et les États-Unis, peu
importent la taille des entreprises et le type d'industries dont
elles font partie.
Mark Hulbert, un analyste des lettres
financières américaines et l'un des chroniqueurs bien connus du
magazine Forbes, a observé que les lettres financières qui procurent
les meilleurs rendements pour leurs abonnés ont une stratégie
fortement axée sur le momentum des cours boursiers. On peut
évidemment citer le cas de la lettre Value Line, mais on pourrait
aussi ajouter les lettres MPT Review de Louis Navellier et OTC
Insight de Jim Collins.
James O'Shaughnessy, auteur de What Works on
Wall Street et gestionnaire de fonds de placement, est l'un des plus
ardents promoteurs des stratégies d'investissement qui reposent sur
le momentum des cours boursiers. Sa stratégie, dans les marchés
canadiens, consiste à acheter les 25 ou 50 titres de la Bourse de
Toronto qui ont monté le plus depuis un an. il renouvelle le
portefeuille une fois l'an, et il s'assure que les titres choisis
respectent les trois critères suivants:
1. Un bénéfice annuel supérieur à l'année
précédente.
2. Un multiple cours/chiffre d'affaires par
action inférieur à 1,5.
3. Un volume de transactions suffisant pour
renouveler son portefeuille en moins de 20 jours.
En somme, O'Shaughnessy fait un beau mariage
d'analyse technique et d'analyse fondamentale.
Un investisseur comme James O'Shaughnessy
renouvelle son portefeuille une fois l'an seulement. Sa stratégie est
simple, disciplinée et n'exige de l'investisseur que quelques heures
par année pour la gestion de son portefeuille. Dans le dernier
chapitre du livre portant sur l'analyse technique au moyen
d'Internet, j'expose une stratégie de momentum extrêmement simple et
tout à fait stupéfiante quant à ses rendements des 15 dernières
années, celle de Jon Markman, l'éditeur du site Internet
MoneyCentral, propriété de Microsoft.
André Gosselin
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